vendredi 19 avril 2024

Le Beaver Club pour toujours!

Montréal est une ville ludique, où les gens aiment s’amuser été comme hiver: Festival du Jazz, Festival Juste pour rire, Montréal en Lumière. Le plaisir des sens, des yeux, des oreilles, de la bouche…Low food, fast food, moléculaire. Avec ses mille restaurants, Montréal est la ville gastronomique du Canada. Le choix est grand, parfois surprenant et plein de fantaisie, mais rarement décevant et il y en a pour toutes les bourses.

Ce soir nous sortons à deux et nous cherchons un restaurant gourmet pour nous régaler. Un restaurant qui va nous proposer des produits du terroir québécois frais, qui se retrouveront dans notre assiette avec toutes leurs saveurs, sans fard. Nul besoin d’avoir un maître d`hôtel pour nous expliquer ce que nous allons déguster, parce que nous voulons le voir, le sentir et le goûter par nous-mêmes. Nous cherchons également un restaurant très confortable parce que nous allons célébrer notre fête d’amoureux. Nous nous apercevons que de mille, notre liste se réduit à dix. Nous voudrions aussi, si l’envie nous prenait, que le restaurant puisse nous proposer des plats flambés, comme des crêpes Suzette, qu’il y ait un chariot de fromages et un chariot de desserts, et un grand choix de vins. Il n’en reste qu’un, le Beaver Club du Fairmont Le Reine Elizabeth.

jean yvon officiant au champagne

Jean-Yvon Le Dour; Gérant du Beaver Club

Nous réservons et nous sommes à l’heure. Nous pénétrons dans la salle spacieuse et magnifique du Beaver Club et nous sommes reçus par le gérant de qui me salue par mon nom. Se souvient-il de moi d’une autre fois? Je lui demande sa carte : Jean-Yvon Le Dour. Très charmant, très expressif, il respire la joie de vivre. Justement ce que nous voulons ce soir. Il nous conduit à notre table, elle est magnifique, ornée d’un joli bouquet de fleurs. On nous place, et avec gentillesse on nous propose une coupe de champagne. La fête commence! Et avec elle une valse de serveurs et de petits soins autour de nous. Nous sommes heureux.

Tandis que nous buvons notre excellent champagne je raconte à ma bien-aimée que le Beaver club fondé en 1785, est le club gastronomique le plus ancien du Canada, et qu’il loge au Fairmont le Reine Elizabeth depuis 1958.
Lorsque Michel Busch a pris la direction de la restauration en 1984, c’est sous son impulsion que les agapes présidentielles du Club qui se tenaient toujours dans la salle à manger du restaurant furent déplacées au Grand Salon de l’hôtel. Ce furent pendant douze ans des événements grandioses pouvant accueillir jusqu’à 400 personnes qui se tenaient dans le cadre de somptueux dîners galas.

Ceux-ci étaient ponctués de parades spectaculaires, escortées par des musiciens et auxquelles participaient, plus souvent qu’autrement, des animaux. Qui ne se souvient pas de Guy-Guy l’ours noir, mascotte du Club, du tigre qui s’était échappé de son chariot allégorique ou de cet immense éléphant (en fait ils étaient deux) qui à cause d’une panne accidentelle du monte-charge de l’hôtel avait du descendre « à pied » les marches de l’étage des congrès jusqu’au Grand Hall pour accéder, à 2 heures du matin , sur le boulevard René Lévesque où l’attendait un camion pour le ramener chez lui au zoo de Granby.

Bien des gens faisant partie du gratin montréalais, du monde des affaires, de la classe politique, artistique et sportive sont membres du Bever Club, même des personnalités de renommée internationale, comme Bill Gates ! On retrouve leurs dédicaces sur le grand Livre du Club.

On nous apporte l’amuse-bouche, amitié du chef Martin Paquet. Une délicieuse entrée en matière.

Nous avions pensé à prendre les mêmes plats pour partager les mêmes sensations pendant notre souper d’amoureux, mais le menu est si tentant que nous commettons notre première infraction aux entrées. Le Beaver Club propose toujours des entrées froides et chaudes. Mon amie choisit une Mosaïque de thon blanc et d’omble chevalier à l’orientale, radis japonais et champignons Énoki. Je jette mon dévolu sur le Foie gras de canard de St. Louis de Gonzague en duo, façon torchon et pressé, confiture de carotte et panais au cidre de glace. J’avoue que j’avais hésité longtemps sur les entrées chaudes. Le Duo St-Jacques et langoustine en raviole, ouverte aux chanterelles et céleri rave jus d’une marinière aux herbes me tentait grandement, tout comme le Bonbon croquant de ris de veau aux épices douces, mais il fallait choisir.

Les plats arrivent, tellement beaux. Dans un grand restaurant on ne s’échange pas les bouchées, mais nous sommes des gourmets et c’est notre fête d’amoureux. On nous apporte très gentiment deux assiettes et nous pouvons partager toutes nos sensations gustatives.
Chaque bouchée de ces deux entrées c’est le ciel! Comme boisson on nous propose du vin blanc, mais nous préférons rester au champagne et on nous sert deux nouvelles coupes.

Comme deuxième plat nous hésitons encore. Il y a les grands classiques du Beaver Club qui n’ont pas changé en cinquante ans : le Filet de bœuf Wellington grande tradition et le Châteaubriand, bouquetière de légumes, sauce béarnaise. Le bœuf est servi en chariot. Au Beaver Club il y a toujours des poissons, des volailles, de la viande et immanquablement un gibier. Nous choisissons le gibier de saison : Longe de biche de Boileau poêlée au tabac de poivre long et des baies de genévrier, sauce poivrade au chocolat grand cru, qui nous est servi avec un Pétales d’Ossoyos, VQA, Okanagan Valley. Les assiettes sont superbes, elles exhalent un fumet invitant et au goût la viande est tendre, délicieuse avec les sauces parfaitement calibrées. Je suis un peu vieille garde, en cuisine j’aime voir et savoir ce que je mange. Ici c’est la grande cuisine classique bourgeoise, fraîche et délicieuse.

Ce qu’il y a d’agréable au Beaver Club c’est l’ambiance. C’est plaisant d’entendre les cris de joie lorsque les tables sont servies et l’admiration des convives devant les flammes magnifiques des crêpes Suzette.

Nous mangeons lentement, appréciant chaque bouchée, chaque goute de vin. À chaque bon plat, mon amie fermait les yeux et en avalant sa bouchée prononçait un très sincère «delicious». . Rien d’étonnant à ce que le Guide Debeur ait nommé le Beaver Club, «Restaurant de l’année» pour 2011 et qu’il le note toujours 4 étoiles.

le chef jean mark lon

Roger Huet et le Sous-Chef Exécutif Jean-Mark Léon

Comme le Chef Martin Paquet est ce soir à un congrès gastronomique, c’est le Sous-chef exécutif Jean-Mark Léon, qui passe nous dire un petit bonjour et qui s’enquiert si tout est à notre goût. Il nous parle de son souci pour apporter toujours des produits du terroir frais. Ma fiancée lui dit qu’elle a entendu parler de leur jardin vert biotop sur le toit, M. Léon lui explique que c’est dans un souci de fraîcheur et que dans ce potager, ils arrivent à récolter jusqu’à 150 bacs de légumes et de produits biologiques.

fromageoriginal

Devant l’impressionnant chariot de fromages qui arrive, je demande conseil au Sous-chef exécutif. Il me signale qu’avec une fromagerie associée, ils ont crée des fromages hors commerce, qu’on ne peut déguster qu’au Beaver Club. Il y en a justement un dont la croûte brune et granuleuse ressemble à s’y méprendre à une peau de porc. Nous le choisissons. Il est superbe!

Lorsque je me retrouve en tête-à-tête avec ma beauté orientale, elle me dit qu’elle n’a plus de place pour le dessert; moi, par contre, je ne saurais dire non à un dessert, parce que dans la tradition occidentale on finit toujours un repas par une gâterie sucrée.

encore des desserts

Au Beaver Club d’ailleurs ils ont leur propre pâtissier. J’hésite entre la douceur chocolat grand cru aux fruits tropicaux, la trilogie des crèmes brûlées à la coque et le nougat glacé de Blanche Neige. Je prends le dernier et avant le café je ne peux résister à un gâteau Forêt-noire, préparé comme à Vienne, une merveille. Si j’avais eu de la place j’aurais aussi voulu le soufflé au citron vert et sorbet à la téquila, mais ce sera pour une autre fois.

quel expresso

L’expresso avec lequel nous avons terminé ce merveilleux souper était parfumé, onctueux, comme il se doit.

L’addition somme toute était très raisonnable. Si nous avions eu un repas semblable dans un restaurant de cette catégorie en Europe ou aux États-Unis, nous aurions déboursé de cinq à dix fois le prix que cela nous a coûté.
C’est ma fiancée qui m’a suggéré le titre de cette chronique : Le Beaver Club pour toujours! The Beaver Club Forever! Ce soir nous sommes heureux!

Voici les coordonnées du BEAVER CLUB :
900 Boulevard René Levesque Ouest, Montréal,
QC H3B 4A5
(514) 861-3511, poste 2448

Par Roger Huet
Président du Club des Joyeux

À propos de l' auteur

Roger Huet - Chroniqueur vins et Président du Club des Joyeux
Québécois d’origine sud-américaine, Roger Huet apporte au monde du vin sa grande curiosité et son esprit de fête. Ancien avocat, diplômé en sciences politiques et en sociologie, amoureux d’histoire, auteur de nombreux ouvrages, diplomate, éditeur. Il considère la vie comme un voyage, de la naissance à la mort. Un voyage où chaque jour heureux est un gain, chaque jour malheureux un gâchis. Lire la suite...