samedi 20 avril 2024
Il était une fois... Natalie Richard

Il était une fois... Natalie Richard

Natalie Richard est un peu la Claire Pimparé (Passe-Carreau) du monde de la communication vinicole. Leurs deux noms sont bien ancrés dans une aventure télévisuelle, plus ou moins lointaine, et on en a tous des souvenirs qui nous font sourire quand on les évoque. On a certes une image de Natalie, mais est-elle bien réelle? Qui est la vraie personne derrière le personnage que l'on croit connaître? J’ai eu le plaisir de passer quelques heures avec elle, et voici ce que j'ai pu apprendre :

Comme on disait dans les disques de Disney: « Et maintenant, commençons! »

Natalie vient d'une famille dont les parents sont instituteurs. Elle vient de Montréal, mais a passé sa jeunesse entre L'Assomption et les Cantons-de-l'Est, où elle a vite découvert les charmes des fromages qui font skouik skouik. Puis rapidement, grâce à ses parents qui était des hôtes de réceptions très courues, elle se retrouve à apprendre les secrets d'une dégustation vins et fromages réussie. Des comptoirs de la Commission des Liqueurs, pour se procurer les incontournables (à l`époque, bien sûr) Pisse-Dru, Mouton Cadet, et Black Tower, au passage à la pâtisserie-boulangerie française de L'Assomption, de la pause des petits drapeaux du pays sur chaque fromage, jusqu'au service avec la petite serviette blanche au bras, elle acquiert ses premières armes qui la mèneront du service en restauration jusque devant les caméras de télévision.

Le chemin jusque-là est toute une aventure!

(Tintements de la Fée Clochette)

En même temps que se développe son talent pour les arts de la table, son autre passion prend son envol: la musique. Aux classiques leçons de piano de son enfance, se rajoutent des cours de chant avec la célèbre Ranee Lee. À l'UQAM, pendant des études dans le très contingenté département des communications, on la retrouve dans un band de latin jazz. Qui aurait cru qu'un jour on la verrait au Club Bijou, en même temps que Lara Fabian, qui y faisait ses débuts! Et comme bien des artistes en devenir, pour subvenir à ses besoins, elle sera serveuse au Café Montmartre, sur St-Denis, et barmaid à l'Odéon, où commençait Philippe Laloux, lui-même musicien.

1986 sera une année marquante: les premières aventures à Toronto. D'abord à Radio-Canada en français, elle sera une Miss Météo. Puis, la voici pour la première fois VJ à MusiquePlus, dont les émissions sont enregistrées dans les studios de MuchMusic. Après quelques années, on vient la chercher pour faire une émission de variétés à TQS, qui s'appellera « C'est à ton tour », avec Stéphane Rousseau. Donc, retour vers Montréal. Mais si le salaire était des plus intéressants, les conditions de travail et le cadre de l'émission l'étaient beaucoup moins. Après un an, fin de cette première incursion télévisuelle.

(Tintements de la Fée Clochette)

Les années 90 commencent, ma foi, par des contrats inhabituels! Vous auriez peut-être sursauté de la voir en Pierrot, livrant des ballons de fête dans les maisons cossues de Westmount. Elle a ensuite monté les échelons pour devenir Fée Marraine, en offrant des télégrammes chantés, dont les paroles étaient adaptées à la vie de la personne fêtée. Des prestations qui étaient, de son aveu, particulièrement lucratives. Tant qu'à y être, ajoutons un autre rôle qui lui a beaucoup plu: elle est devenue Mata Hari au mémorable restaurant La Maison Hantée. Le plus loufoque de ses exploits, c'était d'y commencer en Mata Hari, puis de se changer en Fée Marraine, d'aller faire un télégramme chanté, et de revenir en Mata Hari morte-vivante avant la fin de la prestation. Chapeau bas, Madame Richard!

À peine revenue d'un tour de chant d'un mois pour les Casques bleus, au Moyen-Orient, elle reçoit un appel inattendu: MuchMusic veut qu'elle revienne au bercail, à Toronto. Elle s'y rend pour rencontrer des producteurs, mais après trois jours de négociations intenses, elle se rend compte que le salaire offert ne sera pas suffisant pour une vie très active à Toronto. Elle est prête à rentrer à Montréal, et pendant un petit 5@7 final avec un ami, elle téléphone au grand patron de MuchMusic, Moses Znaimer, pour le remercier de son intérêt et lui dire son regret de ne pas avoir pu trouver de terrain d'entente. Ce dernier, de but en blanc, lui demande ce qu'elle veut. Prise de court, elle sort un bon montant. Acceptation immédiate! Le 5@7 ayant commencé sa phase de réduction d'inhibitions, elle ajoute à brûle-pourpoint qu'elle aura besoin d'un appartement pour la première année. Affaire conclue!

Nous sommes vendredi en fin d'après-midi, et Natalie vient de réaliser qu'elle doit quitter Montréal et commencer sa nouvelle carrière lundi matin à Toronto. Deux jours, pendant une fin de semaine, pour prendre ses affaires et changer de vie...

Le lundi matin, elle arrive aux studios avec sa voiture remplie d'effets personnels (dont sa planche à repasser), apprend qu'elle a la couverture d'un band ce soir-là, lit les annonces classées, prend rendez-vous pour la visite d'un appartement, va le visiter le soir, tombe en amour avec la vue sur les gratte-ciels éclairés, convainc la proprio de lui laisser les clefs, prend une douche et s'en va couvrir le spectacle. La belle vie venait de commencer. Cinq ans de vie folle et palpitante, dont l’un des hauts points est sans contredit lorsque le célébrissime comédien Mike Myers dit, dans son top 5 des choses qu'il adore du Canada, en pleine cérémonie des Gemini Awards (les Prix Gémeaux), après la Soirée du hockey, le régime d'assurance universelle, le contrôle des armes, il finit par nommer le Québec, car, come on: Natalie Richard! Schwiing! (prononcé à la Wayne's World) Et elle était dans la salle!

(Tintements de la Fée Clochette)

En 98, la musique ayant été bien couverte et sentant la locomotive ralentir, elle change de train, et la voici à bord d'une émission de recettes. D'abord avec The Great Canadian Baking Show. Ensuite, elle part à la Nouvelle-Orléans, comme traductrice sur des plateaux de tournage de cinéma. Finalement, en 2000, c'est au tour de Canal Vie de la recruter pour coanimer Cuisiner avec Jean Soulard. Une super expérience. Mais l'amour viendra changer la donne.

La voici maintenant rendue à Hong Kong, où son mari est avocat spécialiste en immigration pour gens d'affaires. Puis, ce sera un an à Dubaï, où elle commence à écrire dans la presse des expatriés, le Dubaï Gulf News, une chronique Two days in... Elle est également prof de yoga et coach de nutrition, une autre aventure qui se révèle lucrative et intéressante. Puis, comme le Petit Bonheur de Félix Leclerc, un jour, l'Amour a repris son chemin.

(Tintements de la Fée Clochette)

2008: il faut repartir à zéro, de retour à Montréal. Allez, on se retrousse les manches et on embarque sur le dos de cette nouvelle créature: les réseaux sociaux! Elle écrira le premier blogue gourmand pour la revue Châtelaine. Ensuite, elle mettra en ligne une centaine de vidéos culinaires, tournées dans sa propre cuisine. Elle approfondit ses connaissances en herboristerie, puis elle publie deux livres de recettes, mettant l'accent sur le plaisir de cuisiner et la santé.

Souvent, elle se fait inviter dans des soirées repas avec des vignerons, et elle se rend compte que si elle comprend les concepts d'accords, le vocabulaire pour bien les formuler lui échappe. Et ça, ça ne va pas du tout. Elle veut suivre la formation de sommellerie de l'ITHQ. Petit hic, elle est mère d'une toute jeune fille dont elle a la garde. Heureusement, elle obtient le soutien de son nouveau conjoint, et peut suivre ses cours le soir. Les ayant bien réussis, elle a maintenant une nouvelle corde à son arc.

(Encore les tintements)

Les contrats écrits diminuant, elle a la chance de se retrouver sous les ailes d'une précieuse mentore, Christiane Langevin, et elle sera pendant deux ans représentante dans son agence d'importations privées. Puis elle crée Sommelier sur mesure, où elle monte la carte des vins pour des restaurants. Elle y acquiert un certain succès, mais finit par réaliser que la gestion des cartes de vin et le démarchage de représentante commencent à être difficiles à gérer.

Une autre personne ayant eu un impact crucial dans sa vie est Jessica Harnois. Elle lui propose de se joindre à son équipe de Vins au Féminin, et lui fait prendre conscience qu'en fait, elle est beaucoup plus à l'aise avec le volet communication que le volet gestion. Et surtout, elle lui fait réaliser pleinement que le vin est une vraie passion dans sa vie. Elle veut en vivre. Elle veut aussi continuer d’apprendre à le connaître, ce vin! Après le niveau 3 du WSET, elle est animatrice de cours de dégustation avec Savori. C'est super pendant quelque temps. Puis, cette soif de connaissances supérieures la reprend. En 2017, elle vend sa maison et pleine de palpitations, elle se rend à New York pour commencer le niveau 4 du WSET. Pendant un an, elle navigue entre les contrats à Montréal et les cours à New York. Un an dans ses valises, qui bouleverse évidemment sa vie personnelle et qui la force à garder le cap sur des buts bien précis. Entre autres? Avec le prochain diplôme, avoir une reconnaissance concrète de son apprentissage du monde du vin. Assumer qu'elle a légitimement sa place dans le monde de la sommellerie. Pouvoir donner des conférences avec compétence et assurance.

(Les derniers tintements de Clochette?)

- Et l'avenir, on le voit comment, Natalie?

- J'ai un désir, presqu'une mission: que les gens réalisent que le vin est un produit de la terre, et qu'il y a tout un travail, avec de vrais gens, derrière. Que les gens apprécient la différence entre le vin d'auteur et le vin d'usine, et en même temps qu'ils sachent que c'est aussi fait pour tous, que connaître le vin ce n'est pas qu'une démarche intello. J'aimerais aussi, parallèlement, mettre en valeur le vin et la sommellerie, avec une démarche dans les médias. Par exemple, au travers de capsules vidéo, découvrir ce qu'on boit, en interviewant des sommelier(e)s de partout dans le monde, ou en rencontrant des producteurs et des vignerons pour apprendre comment ils voient le vin. Je vais aussi publier un livre aux Éditions Ulysse, Routes des vins, dans la collection 50 itinéraires de rêve, que j'ai tellement hâte de partager avec le monde. Probablement à l'automne 2019

L'entrevue semblant s'achever, Natalie et moi discutons de notre dernière présence au Festival des vins de Saguenay, où on a commencé une nouvelle collaboration. Il faut vous dire qu'au fil de nos rencontres dans les diverses activités vinicoles à Montréal, on s'est découvert plusieurs affinités dans les styles de vins que nous apprécions, une passion commune pour le vin, et un cheminement assez similaire dans notre apprentissage. On avait aussi envie de montrer notre complicité avec un projet monté ensemble. J'ai créé un personnage de Bacchus dégustateur de vin, avec mes capsules YouTube d'Olivier le Sommelier, et Natalie avait envie de se joindre à mon univers loufoque mais non dénué de sens. On va donc faire des capsules vidéo, où Vénus et Bacchus partageront des découvertes vinicoles et ce qu'évoquent ces vins pour eux. À suivre, prochainement.

Alors que le muscadet n'est plus qu'une petite mare au fond du verre final, Natalie me confie un dernier projet secret: un retour éventuel à la terre familiale. Son père a un petit domaine bio dans le comté de Bellechasse, où il cultive des pommes. Elle aimerait en transformer une partie en vignoble, faire du vin, de la vigne jusqu'au chai, et partager son projet avec le public et les médias, à l'image de ce que font certaines vigneronnes de Sicile, comme Ariana Occhipinti, qu'elle vient de rencontrer. Puis, partir tous les hivers, aller voir ce qui se fait dans le reste du monde du vin. Il y a pire comme avenir, n'est-ce pas?

Pour mieux connaître les projets et les réalisations de Natalie (sans H, en hommage à son grand-père britannique), vous pouvez aller faire un tour sur son site Web Natalie Richard.

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VINS CONSEIL
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À propos de l' auteur

Diplômé sommelier-conseil de l’Université du vin de Suze-La Rousse, en France, j’ai commencé mon apprentissage du monde vinicole en suivant les cours Les Connaisseurs de la SAQ. Aujourd’hui, j’en suis devenu un animateur! Chroniqueur vins et alcools dans diverses publications, dont le magazine Fugues, je parcoure la planète pour mettre images et visages sur ces produits qui me font vivre tant d’émotions.