Il y a 4 ou 5 ans, j’ai rencontré Daniel Blais un québécois installé en France depuis une vingtaine d’années. Comme point commun nous avions un intérêt partagé pour le vin, moi comme ex-SAQ et amateur, lui en tant qu’actionnaire d’un vignoble dans le sud-ouest de la France. Par surcroit, nous nous étions donné rendez-vous dans un restaurant de plein air tenu par Thierry Cornuet allias Big-T, un français qui a vécu au Québec quelques années avant de rentrer au bercail, non sans être totalement imprégné de la culture du terroir québécois. En outre, j’avais brièvement côtoyé Thierry à l’époque où j’étais à la SAQ et qu’il était représentant pour un cidre québécois. À nous trois, nous tisserons une toile dans laquelle bien des victimes se feront agréablement piéger.
La force d’un réseau
Il y a peu, le master chef du BBQ Big-T accoutré de la traditionnelle veste à carreaux rouges et noirs a déménagé ses pénates pour un ouvrir le Shack & Co restaurant-concept, dans un charmant village de l’arrière-pays niçois. Pour souligner ce transfert et annoncer différents autres projets d’investissements qui émanent du cerveau hyper actif de Big-T, Thierry et Daniel, qui entre-temps ont noué des liens professionnels, ont organisé une présentation à un groupe d’éventuels investisseurs. J’y ai été convié…non pour mon portefeuille mais par considération patriotique.
Par ailleurs, il y a quelques temps j’avais fait la connaissance de Louise Chalifour originaire de Québec qui dans ses temps libres officie comme Consule-Honoraire du Canada pour le département des Alpes-Maritimes. Je l’ai présentée à Daniel qui l’a conviée pour l’événement au Shack & Co et l’a à son tour présenté à Big-T. C’est ainsi que la roue tourne, que le réseau s’élargi et que la solidarité opère.
Or, lors de cette soirée pour nous désaltérer et nous sustenter, Thierry avait convié quelques artisans régionaux dont deux jeunes femmes tenant chacune un stand et proposant des vins locaux aux convives… tiens-donc! L’ami Robert Gillet, un autre québécois en cavale hivernale, qui m’accompagnait et à qui rien n’échappe, me dit « tu devrais aller rencontrer la dame qui présente des vins juste à côté ». Obtempérant, je me suis présenté à elle et tout en dégustant ce qu’elle m’offrit, j’entrepris un brin de causette : « ce sont vos vins ? » - « Non je tiens une boutique de vins à Tourette-sur-Loup » - « et vous êtes? » - « Leah van der Mije voici mon conjoint Kevin ». Le verre à la main, la discussion se fluidifie puis Leah et Kévin m’expliquent qu’ils cherchent à présenter un logiciel de gestion de caves à vins aux restaurateurs étoilés et aux hôteliers de prestige de la Riviera. Je sors alors le grand jeu et lui dit qu’au Québec il existe un outil qui a fait ses preuves, un logiciel baptisé Alfred. « AHHH, c’est pas vrai !», de s’exclamer Leah, « je leur ai parlé au téléphone cet après-midi. Nous partons la semaine prochaine à Montréal et je vais rencontrer leur équipe » - j’ajoute « vous allez rencontrer Alain Cloutier je parie? » - les deux au bord de la syncope « bin oui justement… Alain Cloutier » - et moi de lui répondre « vous êtes entre bonnes mains, Alain est un ancien collègue du temps de la SAQ ». Sacré petit monde!
Leah et Kevin Hamon sont donc allés au Québec pour rencontrer les équipes d’Alfred, juste après les deux bordées laissant 70 Cm de neige derrière elles. Toute guillerette Leah, pour qui c’était le premier périple outre Atlantique, a fait l’apprentissage de notre hiver québécois. Depuis, d’autres rencontres de travail se sont tenues en vue d’implanter le logiciel Alfred en France. J’y reviendrai dans une prochaine chronique…soyez vigilants!
Leah Van der Mije et Kevin Hamon posent fièrement devant la boutique Leah Wine
Leah Wine
Aujourd’hui, je veux surtout vous parler du parcours singulier de Leah Van der Mije la femme dynamique, enthousiaste et au fort esprit entrepreneurial. Ainsi, cette semaine une petite cohorte de québécois s’est rendue chez Leah Wine, la bien nommée boutique de vins ayant pignon sur la place de Tourette-sur-Loup. Nos hôtes nous ont accueilli avec chaleur et Leah fit prestement sauter le premier bouchon. Robert, qui n’a rien perdu de ses réflexes d’interviewer, entreprit de questionner Leah, je n’avais qu’à prendre des notes. Je résume…fraîchement diplômée du Collège hôtelier de Nice, Leah a fait ses premières armes dans les palaces de la Croisette à Cannes. « Toute jeune, voyageant avec mes parents, j’adorais l’atmosphère glamour et feutrée des grands hôtels, je rêvais de travailler dans un environnement semblable ». Voilà un premier rêve de réalisé ! Ensuite Leah s’est offert un road-trip en Australie et Nouvelle-Zélande. Mais pas que pour se la couler douce…pour bosser et mettre à profit ses nouvelles compétences. La sommelière en herbe fut d’abord recrutée dans un chic bar restaurant de Sydney où les tenanciers lui firent rapidement confiance et la laissèrent gérer la place au bout de quelques semaines. Puis vinrent les vendanges et Leah tout heureuse de s’y astreindre. Quelques mois plus tard…changement d’île. Leah met cap au sud-est et traverse en Nouvelle-Zélande. Ce qui la frappe c’est « l’ouverture qu’on les néo-zélandais face aux vins du monde entier. C’est là que j’ai vraiment appris à déguster et qu’est née ma passion ».
De retour au pays, elle rencontre son futur mari chef propriétaire du restaurant Clovis à Tourette qui à force d’efforts et de passion, obtient une étoile au Guide Michelin. Parallèlement, Leah ne se languit pas de sa passion pour les produits de la vigne et ouvre son premier bar à vins à côté du restaurant. Forte de la réputation du restaurant étoilé, il est alors plus facile d’aborder les producteurs et d’obtenir des allocations de producteurs prestigieux comme Emmanuel Reynaud du Château Rayas.
Puis la Covid frappe, les commerces sont sur pause et après deux semaines à se prélasser Leah se diversifie et devient entremetteuse de cartons de vins. En effet, ses clients sont toujours aussi curieux et assoiffés et de leur côté, les producteurs ont des stocks à écouler. Leah de se dire « internet existe et les livraisons sont permises ». Ne lui restait qu’à orchestrer cela…ce qu’elle fit. Si bien qu’après avoir collectivement émergés de cette crise au bout de trois ans, Leah entreprit de repenser son bar à vin et de le replacer près de la grande place et c’est ainsi que fut inauguré Leah Wine, en juillet 2023. Avec son nouveau conjoint Kevin, brillant informaticien et ancien joueur semi-professionnel de hockey, ils flirtent avec ce nouveau projet dont je vous parlais plus haut…Alfred ! À suivre…dans une prochaine chronique.
La bande de joyeux québécois en balade à Tourette-sur-Loup:
Robert Gillet, Jean Chouzenoux, Michel Duplessis et André Rondeau
J’ai aussi annoncé Auguste Escoffier
Revenons à la soirée d’informations organisée par Daniel Blais et Thierry Cornuet. Je vous parlais de deux stands…et bien juste à côté de celui de Leah, une jeune fille présentait un mousseux rosé élaboré à Gassin. Surprise ! là aussi la rencontre ne fut pas banale. Les présentations d’usage faites, j’admire les bulles dans mon verre pose une ou deux questions d’intérêt et nous devisons quelques instants sur nos parcours respectifs. Au bout de quelques minutes, Andra Oprea me dit « prochainement j’organise une compétition culinaire d’influenceurs Instagram à Grasse, sous le parrainage de Michel Escoffier, l’arrière-petit-fils du célèbre Chef et auteur culinaire Auguste Escoffier. J’aimerais vous inviter comme membre du jury, sur notre panel d’experts » !
La compétition se tiendra le 27 avril prochain au somptueux Château St-Georges dans l’écrin provençal qu’est la ville de Grasse. Là aussi je viendrai vous faire rapport dans un prochain texte au début mai. J’ajoute en tout respect que cette expérience avec des influenceurs sera une opportunité de…rajeunir ma banque de contacts professionnels !
Conclusion
Voilà comment de fil en aiguille chacun tisse sa toile et constitue son réseau. Comme les québécois ont dans leur ADN l’amabilité et l’entregent, les ingrédients magiques et propices aux relations humaines, il est aisé de socialiser. Enfin, on a beau être à 6000 km de la maison, on finit toujours par se retrouver en des lieux communs où la fraternité doublée d’une saine énergie nous animent.