jeudi 25 avril 2024
COVID-19 - Chronologie d’une infection

COVID-19 - Chronologie d’une infection

J’ai hésité.

Non par pudeur, ni par crainte des jugements; après tout, nous sommes tous égaux face à cette pandémie. Mais simplement parce qu’avoir été atteinte du virus ne fait pas de moi une experte en la matière et loin de moi l’intention de me positionner comme tel.

Je ne peux donc que partager mon expérience personnelle et si j’ai choisi de le faire après mûre réflexion, c’est un peu pour remettre les choses en perspective.

À ceux qui doutent encore : non, cette pandémie n’est pas un vaste complot. Elle est belle et bien réelle.

À ceux qui clament qu’il s’agit d’une simple grippe : non. La COVID-19 n’a rien à voir avec une simple grippe.

Et oui, en effet, il y a beaucoup de désinformation, de peur et de zones floues.

D’autant plus que pour chaque personne atteinte les symptômes et conséquences seront différentes… et on ignore toujours les dommages à long terme.

Je me situe dans la bonne moyenne au niveau de l’atteinte : ni asymptomatique, ni légère, ni sévère. Je vous relate la chronologie platement typique d’une infection au coronavirus…

Depuis le mois de mars dernier, par mon rôle d’aidante-naturelle, je me suis imposée une vie quasi-monastique. Je porte le masque systématiquement; je me lave religieusement les mains et je refuse toutes les invitations où je ne peux contrôler mon environnement.

Je me gave de vitamines C et D et j’ai une hygiène de vie on ne peut plus saine. Vivant seule, mon quotidien privé de travail est donc limité au strict minimum au niveau des contacts sociaux.

Depuis fin septembre, cependant, j’accueille chez moi, temporairement, une de mes copines. Le second confinement m’est donc plus agréable à vivre. Mon amie travaille, donc je ne la vois que le soir. Nous évitons les rapprochements à moins de 2 mètres, mais non, nous ne portons pas le masque dans la maison et nos deux chambres sont situées à l’opposé l’une de l’autre. Nous partageons la cuisine.

Lundi le 2 novembre : 

Il fait un froid cinglant pour début novembre et les vents sont violents. Je décide d’aller chercher mon amie à la fin de sa journée de travail pour lui éviter un retour désagréable. Sitôt dans l’auto, elle me dit se sentir exténuée et avoir des frissons. Nous accusons toutes les deux ses longues heures de travail et le temps maussade pour son état. Après le diner je lui suggère d’aller se coucher et je prends sa température : 38,5 °C.

Comment se fait-il qu’à ce moment précis je n’ai pas réalisé qu’il pouvait s’agir de la COVID-19? Cela me semble totalement incohérent. Oui, j’ai pris le thermomètre à mains nues.

Mardi le 3 novembre : 

Ma coloc ne va pas mieux. La fièvre est toujours à 38,5 °C. Son patron lui suggère fortement d’aller passer un test de dépistage; il ne veut prendre aucun risque. Ce qu’elle fait illico.

Nous décidons de nous mettre toutes les deux en quarantaine en attendant son résultat et nous retraçons tous ses contacts des 3 derniers jours en leur demandant de surveiller leurs symptômes.

De mon coté je vais toujours bien. Je redouble de prudence, mais je me dis que ma santé est solide. Ma coloc est confinée dans sa chambre. Je lui apporte ses repas gantée et masquée. Je désinfecte tout.

Jeudi 5 novembre : 

C’est confirmé : elle est atteinte. On apprendra que sur les contacts retracés, 6 sont aussi confirmés et symptomatiques à différents niveaux (dans les prochains jours, au total, pour un contact atteint, 10 seront contaminés).

Je décide sur-le-champ d’aller passer le test de dépistage malgré l’absence de symptômes. Je me sens toujours en pleine forme et je suis convaincue que je vais faire un pied de nez au virus.

Samedi 7 novembre : 

Je n’ai pas encore eu mon résultat. Ce matin, j’ai un léger mal de gorge. Je prends ma température : 38 °C.

Pas de panique. Ce n’est peut-être rien du tout… Je prends du Tylenol pour calmer la légère fièvre. Santé Canada appelle : mon test de jeudi est négatif! J’ai beau être heureuse de la nouvelle, j’ai un doute. En effet, la fièvre revient dès que les analgésiques ne font plus effet.

Dimanche 8 novembre : 

Mauvaise nuit. Fièvre. Toux. Courbatures intenses qui m’ont empêchée de dormir. Je me doute bien que le virus m’a rattrapée. J’en parle à l’infirmière, qui chaque jour appelle pour le suivi. Je dois absolument repasser un autre test. Il est maintenant sûr à 98% que je suis aussi atteinte. Je repars vers le centre de dépistage d’Outremont (qui en passant est irréprochable et organisé). Je reviens rapidement à la maison retrouver ma quarantaine.

Lundi 9 novembre : 

3e jour de fièvre… mais les courbatures sont moins intenses. Je crois que je suis sur la bonne voie et que tout sera terminé rapidement. Je tousse par quinte, mais je ne me trouve pas trop mal.

Mardi 10 novembre : 

Santé Canada m’appelle : c’est confirmé, je suis aussi atteinte de la COVID-19.

Le résultat n’est qu’une confirmation à ce que je savais déjà depuis quelques jours. Je préviens par souci d’éthique le surintendant de mon immeuble. Ce qui me vaudra une incompréhension et une réaction abusive de la gestionnaire du CA, qui m’écrit une lettre exigeant que je reste confinée 14 jours et que je passe un second test avant de circuler dans l’immeuble. Je lui transmets les directives que j’ai reçues au même moment que mon résultat, qui confirment que le patient atteint doit s’isoler 10 jours à partir du premier symptôme et ne pas avoir fait de fièvre pendant 48 heures pour être considéré guéri. Rien n’y fait : elle se positionne au-dessus de Santé Canada; j’ai droit à tout, sauf un minimum d’empathie de sa part.

La COVID-19 c’est aussi ça : des gens qui paniquent et s’improvisent autorité publique et vous traitent comme des pestiférés.

Épuisée par cet épisode puéril et inutile : je retrouve mon lit. La fière baisse, mais les problèmes gastro-intestinaux commencent.

Mercredi 11 novembre : 

Mon amie, de son côté, est officiellement guérie. Elle ressent encore beaucoup de fatigue et ne retournera pas travailler avant lundi prochain, mais elle se sent bien et n’a pas de fièvre depuis plus de 5 jours. Elle est hors de danger.

De mon côté, je surveille si mon système respiratoire tiendra la route, ce qui me donnerait une entrée directe aux urgences. Mais non… pour le moment, je me bats encore contre mes problèmes gastro-intestinaux, des maux de tête et une soudaine congestion des sinus.

La COVID-19 est différente de la grippe, principalement par la brutalité de l’apparition, de la disparition et de la succession des symptômes. On ne sait jamais ce qui va se présenter dans les heures à suivre… c’est un sale virus rempli de surprises.

Vendredi 13 novembre : 

Moment de panique : je ne goûte plus ma pâte dentifrice à la menthe!

Je ne détecte plus aucune odeur non plus. Incrédule et inquiète, j’ouvre toutes mes bouteilles de parfum une à une, à la recherche d’une odeur connue… je plonge mon nez dans le sac de café… et en désespoir de cause, dans le pot de Vicks Vaporub… RIEN! Je ne sens rien.

Je viens de perdre en quelques minutes mes deux outils de travail, le goût et l’odorat.

J’avoue avoir un petit moment de désespoir à l’idée de ne jamais les retrouver… il ne me restera qu’à changer de métier! Éboueuse ou embaumeuse… un monde d’options s’offre à moi! J’essaie de me rassurer, mais je ris jaune.

Samedi 14 novembre : 

Je n’ai plus de fièvre depuis 2 jours. Mes problèmes gastro-intestinaux sont du passé. Mais l’air ne passe pas dans mes sinus, qui semblent durs comme du béton.

Tout ce que je porte à ma bouche est insipide et a la texture du carton mâché. Je tente en vain de passer chaque petite fiole de mon livre Les odeurs du whisky… rien n’y fait. J’ai beau être positive, l’épicurienne en moi est perplexe face à une vie qui ne sent rien et qui n’a aucun goût.

Dimanche 15 novembre : 

L’infirmière me suggère d’ajouter des épices pour stimuler mes capacités olfactives.

Je me concocte une soupe explosive… tant qu’à ne rien goûter, autant y aller avec un traitement choc : curcuma, cumin, cayenne, piments forts, paprika.

Je ne distingue rien, mais mes lèvres sont en feu!

Mes sinus sont toujours aussi bloqués. Je toussote, mais ça va. 

Lundi 16 novembre : 

Encore 2 jours à tenir sans fièvre et sans soucis pulmonaires et je serai officiellement guérie. L’infirmière me rassure… mon odorat et mon goût vont revenir à l’intérieur de… 3 mois.

3 mois! Heureusement que je n’ai plus de dégustations, de formations ou de salons de vins et spiritueux à l’agenda pour les 3 prochains mois… :)

Mes sinus vont un peu mieux. J’ai encore des maux de tête, mais rien que le Tylenol ne puisse contrôler.

Et soudainement, en reniflant machinalement le café fraichement moulu du matin... un petit chatouillement! Un effluve léger. Je ne rêve pas, je viens de détecter une odeur!

Je me précipite de nouveau sur mes fioles… Bon, ce n’est pas encore ça. Mais le café, le Vicks et certains parfums capiteux commencent à chatouiller quelques terminaisons. Il y a de l’espoir!

Mardi 17 novembre : 

Ce matin, au petit déjeuner, j’ai réussi à identifier la confiture de framboise… ma langue retrouve quelques zones réactives au sucre et à l’acidité. Je suis sur la bonne voie.

C’est ma dernière journée d’isolement. Je ne sortirai pas avant la fin de la semaine, question de bien me conforter dans ma guérison. Il me reste un résiduel de voix caverneuse et de nez bouché, et bien sûr un long chemin vers la récupération de mes sens, mais c’est fait… je peux ajouter à mon CV : survivante de la COVID-19.

Mon périple avec le virus se termine, au mieux. Sans séquelle majeure pour l’heure.

Aucune garantie d’immunité au-delà de 3 mois (et encore!) il ne faut donc pas crier victoire, ni baisser les bras.

J’ai somme toute eu de la chance.

Devons-nous craindre le virus? Oui, absolument. Il est sournois et brutal et que ceux qui le comparent à un simple rhume ou une banale grippe ne se présentent pas devant moi… j’aurai peine à garder mon savoir-vivre.

Si pour certains il passe inaperçu (et c’est aussi ce qui le rend si imprévisible), il rendra malade la majorité pour 10 à 14 jours, à différents niveaux. Peu en décèdent, c’est vrai, mais le risque zéro n’existe pas, alors ne baissons pas la garde.

Au final, oui, on en guéri surtout… c’est comme à la loterie! On ne sait jamais quel numéro nous allons tirer… ni quelle est la charge virale que nous allons croiser sur notre chemin. Et encore moins comment notre système immunitaire est armé pour y faire face.

Face à la COVID-19, nous ne sommes pas tous égaux.

 

Annie Des Groseilliers
Consultante Stratégique Vins & Spiritueux / Expertise Rhum
ASC Barrels - Consultante
Interpener Certifiée
Wine & Spirits Strategic Consultant/Rum Expertise
ASC Barrels Consultant
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À propos de l' auteur

Née au cœur de Montréal, Annie a grandi dans un environnement multiethnique qui allait développer naturellement une ouverture et un intérêt spontané aux diverses cultures. Après avoir fait des études de journalisme à l’Université de Montréal, celle-ci travaille comme journaliste culturelle pour le Magazine Québec Rock. Lire la suite...