Attendez-vous à des comportements différents de la part de vos clients.
Que nous soyons en accord ou non avec la décision du gouvernement Trudeau d’octroyer un congé temporaire de TPS du 14 décembre au 15 février sur une panoplie de produits, et d’accorder un chèque de 250$ à tout citoyen ayant eu un revenu inférieur à 150 000$ en 2023, il reste que cette mesure annoncée risque d’avoir des impacts importants sur les consommateurs.
Cette annonce sera amplifiée si le gouvernement du Québec bouge de la même façon avec un congé temporaire de TVQ. Mais rien n’est moins sûr. Contrairement à l’Ontario ou le Nouveau-Brunswick ou d’autres provinces, dont la totalité de la taxe harmonisée sera exemptée sur les produits admissibles, pour le Québec, jusqu’à preuve du contraire, la TVQ sera maintenue.
Pour plusieurs marchands, cela exigera au cours des prochaines semaines d’identifier dans son magasin les produits admissibles, reprogrammer les caisses (tout un casse-tête informatique pour plusieurs marchands), former son personnel à bien renseigner les clients, et se préparer aux CHANGEMENTS DE COMPORTEMENTS POSSIBLES de la part des clients.
IMPACT #1 : DES VENTES EN DENTS DE SCIE
Nous aurons déjà une bonne idée des répercussions cette semaine avec les ventes du vendredi fou. La nature humaine étant ce qu’elle est, on peut s’attendre à ce que plusieurs consommateurs reportent certains de leurs achats au 14 décembre 2024 plutôt que d’acheter maintenant. Le début de saison de la période des Fêtes risque tout simplement d’être désastreuse pour les commerces de vêtements pour enfants, commerces de jouets, ceux qui vendent des consoles de jeu vidéo, et autres commerces touchés par les produits admissibles au congé temporaire de TPS.
Nous l’avons vécu dernièrement avec les cliniques dentaires à la suite de l’instauration du Régime canadien de soins dentaires. Leurs clients ont tout simplement reporté leur rendez-vous !
D’un autre côté, les commerces touchés par ce congé temporaire de TPS, auraient intérêt à être bien préparés pour le samedi 14 décembre. Il risque d’y avoir du monde dans les départements de jouets ! Les gens ne manqueront pas cette première fin de semaine, au risque de ne pas retrouver plus tard les cadeaux convoités. Si vous êtes ce genre de commerce, prévoyez vos horaires de travail en conséquence.
Le congé temporaire de TPS ne devrait pas trop changer la donne après Noël, si ce n’est que certains clients se feront peut-être davantage plaisir pour l’épicerie et les sorties au restaurant. Comme commerçant, c’est sûrement le temps de miser sur les produits hauts de gamme.
Enfin, ce sera la cohue de la St-Valentin bien avant le 14 février. Sachant que le congé de TPS devrait se terminer le 15 février, attendez-vous à un début de février important sur les ventes de plusieurs produits. Vous souvenez-vous du papier de toilettes au temps de la pandémie ? Eh bien une famille avec de jeunes enfants risquent de faire le plein de couches jusqu’à l’été ! Prévoyez vos stocks en conséquence.
Ensuite, que seront les ventes de certains produits avec le retour de la TPS ? Dites-vous que plus la montée des ventes sera importante au début de février 2025, plus la descente sera brutale à partir du 16 février !
IMPACT #2 : LE MOMENT DE LA FACTURATION
C’est déjà commencé. Un de nos clients restaurateur nous a dit que son client corporatif qui avait réservé une table pour l’ensemble de ses employés le jeudi soir 12 décembre a téléphoné pour savoir s’il était possible de manger le 12 décembre et de recevoir une facture uniquement le 14 décembre. Pour une facture à venir de 2000$ pour un souper de Noël de bureau, ce gestionnaire ne va cracher sur une économie de 140$ s’il est possible de le faire.
Pour les commerces touchés par les produits admissibles, et de plus grande valeur comme un siège d’auto à 800$, questionnez-vous si vous avez le goût d’embarquer dans le mouvement Achetez maintenant, payez plus tard. Attendez-vous à ce que plusieurs clients vous demandent bientôt des mises de côté de vos produits afin de les payer plutôt le 14 décembre, ou la possibilité de bénéficier d’un plan de paiement différés.
À l’inverse, il est fort possible qu’on vous demande une facture à la mi-février pour des achats éventuels à la fin février/début mars. Par exemple, un organisme à but non lucratif qui aimerait préparer un lunch pour son assemblée générale au mois de mars, pourrait vous demander une facture en avance le 15 février.
Quelle sera votre politique face à ces demandes de clients ? Votre décision est pour bientôt !
IMPACT #3 : LES ÉTERNELLES DISCUSSIONS AVEC LES CLIENTS
Vous souvenez-vous de l’intégration de la Politique d’exactitude des prix ? Vous souvenez-vous comment les clients étaient parfois dans l’erreur dans leur interprétation de la politique, ou au contraire, comment certains employés n’étaient pas au courant de ce qu’ils devaient faire à la suite d’une demande justifiée d’un client ?
Eh bien attendez-vous à des clients qui demanderont de ne pas payer la TPS sur leur achat de table tournante, alors que cette catégorie de produits n’est pas admissible, ou à des clients qui s’offusqueront à la caisse que les bottes de skis pour son enfant sont toujours taxables, alors que pourtant ils font bien parties des exceptions de vêtements réservés à la pratique d’activités sportives et qui demeurent taxables.
Bref, si le diable se retrouve dans les détails, attendez-vous à ce que les clients jouent leur rôle de Lucifer à plusieurs moments. Préparez-vous, informez correctement vos employés, placez des affiches au besoin. Vous vous éviterez plusieurs problèmes avec votre clientèle, désagréments que vous n’avez pas besoin en plein achalandage de Noël.
IMPACT #4 : ENCORE LE PRIX ET LES RABAIS
Nous l’avons vécu depuis deux ans. L’inflation a fait changer le comportement de plusieurs consommateurs. Plus sensibles au prix, ces derniers étaient continuellement à la recherche de rabais. Depuis la fin de l’été, nous avions obtenu un répit. Les gens ont recommencé à se faire plaisir, à sortir tranquillement leur portefeuille pour des biens non essentiels, à observer moins le prix de vente dans leur processus décisionnel.
Or, ce congé temporaire de TPS nous ramène deux ans en arrière. Depuis l’annonce, on ne parle que des moyens d’économiser encore davantage, de l’impact du prix de la facture d’épicerie, comment les 250$ auraient pu être distribués autrement, de l’impact réel d’une économie de 7%, etc.
Des applications comme Camelcamelcamel et Le Filtre qui permettent de suivre l’historique des prix de plusieurs produits, sont sur toutes les lèvres. Attendez-vous à ce qu’on parle de réduction de prix pendant les trois mois à venir, et qu’on en reparle encore davantage avec le retour de la TPS le 16 février 2025.
Dans cette discussion autour du prix et des rabais, le commerce de proximité risque de prêcher dans le désert lorsqu’il mise sur l’expérience-client et la valeur ajoutée du service à la clientèle !
IMPACT #5 : L’INDIFFÉRENCE et LE CYNISME DES CLIENTS
Si plusieurs analystes politiques ont vu dans cette décision gouvernementale une stratégie électoraliste, le moins que l’on puisse dire est que l’impact escompté par le gouvernement Trudeau n’est pas celui prévu. Au-delà des lignes ouvertes qui montrent la colère de plusieurs citoyens envers certaines mesures jugées trop onéreuses pour les finances publiques, les réseaux sociaux ne semblent pas emballés, et sont plutôt indifférents à la nouvelle jusqu’à maintenant.
Les jeunes interrogés par Détail Formation en fin de semaine ignoraient complètement cette décision gouvernementale, et d’autres qui en ont vaguement entendu parler ne savaient aucunement quels étaient les produits admissibles ou non. Je n’ai rien vu sur les réseaux sociaux qui en parlaient nous dit-on.
Bref, si l’on croit que certains groupes de clients vont faire le party avec plus de bières et plus de croustilles, au contraire, il est fort possible que tout cela ne soit qu’un coup d’épée dans l’eau d’une valeur néanmoins de 4,68 milliards de dollars.
Avec le peu de catégories de produits admissibles et le nombre d’exceptions dans chacune des catégories, ce qui complexifie à la fois la communication et la compréhension du consommateur…il se peut que ces mesures ne changent pas grand-chose dans le pouvoir d'achat des consommateurs ! Et nous le saurons bien assez tôt, vous saurez nous le dire !