Sans le savoir, vous avez peut-être déjà mangé du saumon transgénique. Et toujours à votre insu, le saumon génétiquement modifié pourrait se retrouver encore plus souvent dans votre assiette au cours des prochaines années.

Depuis 2017, des lots de saumons transgéniques en provenance du Panama sont écoulés dans le plus grand secret sur le marché canadien. La petite usine d’Amérique centrale, appartenant à l’entreprise AquaBounty, a la capacité de produire chaque année 30 tonnes de ce poisson génétiquement modifié, qui est importé sans étiquetage au Canada.

Deux immenses usines risquent toutefois de décupler les quantités de saumons transgéniques sur le marché : l’une en Indiana et l’autre à l’Île-du-Prince-Édouard. Ces nouvelles usines bientôt en activité auront une capacité conjointe de production annuelle de près 2000 tonnes métriques de saumons. Une vague de saumon transgénique s’apprête donc à déferler sur le marché canadien. Le Canada étant à ce jour le seul pays qui permette la consommation humaine d’un animal génétiquement modifié.

Incursion dans l’industrie du saumon transgénique

Notre voyage dans le monde du saumon transgénique débute sur les rives de Fortune Bay, à l’Île-du-Prince-Édouard.

Dans la petite pisciculture intérieure de l’entreprise AquaBounty, la directrice des opérations, Dawn Runighan, nous présente ses protégés. Certains sont des saumons transgéniques, d’autres, des saumons conventionnels. Bien qu’ils aient presque le même âge, ces poissons sont de tailles fort différentes.

« Les saumons conventionnels vont rester dans cette pièce pour leur première année de vie. Ils seront transférés lorsqu’ils pèseront entre 100 et 200 grammes, ce qui prend un an. Avec les saumons transgéniques, il faut les transférer plus rapidement. Ils pèseront près d’un kilo au bout de la première année », dit Dawn Runighan.

Vous avez bien lu. Un saumon 5 à 10 fois plus gros dans sa première année de vie. Une performance remarquable. Le poisson transgénique atteindra son poids commercial en un an et demi au lieu des trois ans généralement nécessaires pour un saumon conventionnel; tout ça, grâce à la génétique.

Un peu d’histoire

Au départ, dans les années 90, des scientifiques tentent d’améliorer la productivité des saumons de l’Atlantique. Pour y arriver, ils insèrent au génome du saumon de l’Atlantique un gène du saumon Chinook, afin de le rendre plus gourmand.

Et pour en accentuer l’appétit, ils intègrent au bagage génétique une propriété antigel provenant de la loquette d’Amérique, un poisson des profondeurs. Ainsi modifié, le saumon produit en permanence une hormone de croissance. Le résultat est saisissant : un saumon qui mange et grandit sans arrêt. Il sera nommé AquAdvantage.

AquaBounty n’a l’autorisation de produire que des oeufs dans son usine de Fortune Bay; des oeufs qui sont ensuite expédiés au Panama pour y grandir. Le saumon transgénique est ensuite importé sous forme de filet au Canada, qui demeure le seul pays à autoriser sa vente aux consommateurs.

Lire l'article complet: ICI Radio-Canada du 1er décembre 2018