Il suffit d’une bouchée pour comprendre qu’un légume encore tiède de soleil offre des saveurs que n’égaleront jamais ceux qui ont parcouru des kilomètres pour aboutir sur une tablette. C’est cette évidence que redécouvre une nouvelle génération de chefs en cherchant à rapprocher la gastronomie de sa source. Sa philosophie : plus près, plus frais, plus authentique.
Depuis une quinzaine d’années, le mouvement « de la terre à la table » transforme l’approche culinaire de certaines des plus grandes tables du monde. En France, le chef Alain Ducasse a placé le potager au centre de sa « cuisine de la naturalité ». En Californie, Thomas Keller a installé son prestigieux French Laundry dans sa ferme de la vallée de Napa. Quant au chef danois René Redzepi, il a fait du Noma à Copenhague un laboratoire où la cueillette sauvage, la fermentation et le maraîchage redéfinissent l’idée du luxe.
La fragilité des chaînes d’approvisionnement, révélée durant la pandémie, a renforcé ce mouvement. Au Québec comme ailleurs, la tendance s’affirme à travers différents concepts, notamment celui des tables champêtres qui, en été, proposent des repas gastronomiques concoctés à partir des produits de leur terre. D’autres adresses, comme Fairmont Le Château Frontenac et Fairmont Le Reine Elizabeth, produisent à petite échelle des verdures, des fleurs ou des fines herbes et hébergent quelques ruches.
Plus rares sont les restaurants urbains qui nourrissent leurs tables à même leur terre maraîchère. C’est le cas du restaurant Coteau de l’Auberge Saint-Antoine, dans le Vieux-Québec, qui s’approvisionne en une trentaine de comestibles à sa ferme de l’île d’Orléans. C’est aussi dans ce sillon que s’inscrivent Les Jardins du Monarque.
Depuis le printemps dernier, les chefs Richard et Jérémie Bastien y cultivent leur rêve d’autonomie alimentaire pour leurs restaurants : le Monarque, dans le Vieux-Montréal, et Le Mitoyen, à Laval. Foisonnant de légumes, de fines herbes et bientôt de fruits, les Jardins du Monarque incarnent leur vision d’une gastronomie enracinée, où la main qui cuisine est aussi celle qui récolte.


