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Champ d’étoiles

Deux Belges trouvent un terrain dans le Jura. Ils le fécondent de leur amour, de la sueur de leurs fronts et du travail de leurs mains. Ce terrain devient un Champ d’étoiles. Voilà la fabuleuse histoire de Fabrice Closset et de Valérie Gaziaux que j’ai rencontrée à Montréal.

 

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Valérie Gaziaux

RH – Valérie Gaziaux, votre histoire vigneronne est assez fabuleuse, pourquoi avez-vous appelé votre vignoble Champ d’étoiles ?
VG – Nous avons un parcours atypique, deux Belges ingénieurs agronomes en sciences du sol, ce qui nous a permis de travailler la terre et de conseiller; mon mari en agriculture et en arboriculture au départ en France. Quant à moi, j’ai conseillé des vignerons avec des passages en bio et en biodynamie dans la vallée de la Loire. À force de conseiller notre projet est devenu de produire et réaliser notre produit nous-mêmes et de pouvoir travailler la vigne parce que c’est un des seuls produits où on peut aller jusqu’au bout de la transformation, jusqu’à l’expression de tout ce dont on veut faire passer dans la vigne, jusqu’à exprimer nos émotions. Nous avons laissé en plan la carrière que nous avions entamée pour pouvoir réaliser ce projet. Pour nous la production viticole est un projet de vie ; c’est pour cela que nous voulions un nom assez ouvert. Champ pour nous c’est beaucoup plus ouvert que domaine. Champ correspond également au paysage sur lequel nous travaillons, qui aligne autant des vignes que des prairies et des bois, c’est un paysage très ouvert. Donc champ tombe à pic et étoiles parce que nous avons suivi notre bonne étoile pour arriver jusque là et comme nous sommes en biodynamie cela nous semblait correct d’appeler ensemble champ et étoiles.

RH – Votre premier souci une fois établis sur votre Champ d’étoiles était de faire sa reconversion à la biodynamie et de construire un nouveau chai.
VG – Tout à fait. Pour nous un vin doit traduire une émotion et la manière la plus appropriée par rapport à notre concept et à nos valeurs c’était de partir en bio et en biodynamie. Ayant conseillé des vignerons sur ce concept pendant dix ans, cela me semblait évitent de partir tout de suite avec une technique qui permet de cristalliser ces émotions dans les bouteilles. Nous avons construit un nouveau chai en bioclimatique de manière qu’il épouse le paysage. C’est une réflexion vraiment d’ensemble où nous essayons d’être le mieux possible.

RH – Vous êtes tout nouveaux, puisque vous avez créé votre vignoble en 2008, et pourtant vous décrochez déjà des médailles et la Revue Vins de France vous a remarqués.
VG – C’est le premier millésime et comme je vous l’ai dit nous essayons de transmettre une émotion. Apparemment c’est réussi puisque nos avons été médaillés par le Concours des Vins du Jura pour notre Pinot noir et pour le Chardonnay et dernièrement nous avons été médaillés pour le Crémant du Jura à Paris en Médaille d’or. Pour nous les médailles, ce n’est pas une façon de s’honorer, mais c’est vrai que cela fait plaisir, parce que c’est un juste retour du travail que nous avons fait. Cela nous conforte dans nos choix jusqu’à aujourd’hui. Cela veut dire que le message que nous voulions mettre dans la bouteille a été bien compris.

RH – Quels vins produisez-vous aujourd’hui et qu’est-ce que vous voulez produire à l’avenir?
VG – Nous avons commencé en 2008 les vins typés Jura, les Macvins et les Vins Jaunes. Ils sont toujours en barrique. Les premiers vins vraiment typés Jura nous les aurons pour la Noël. Au départ et pour l’instant nous avons des vins qui expriment et cristallisent les cépages que nous avons sur notre terroir, pour les blancs et les rouges de manière assez bourguignonne, et le Crémant du Jura qui fait le plaisir de chacun. La volonté c’est de continuer dans ce sens et de faire exprimer à chaque vin une émotion. Nous avons des cuvées Chanson qui sont accessibles pour chaque moment de la journée, et nous avons des cuvées Stellaires qui sont plutôt des vins de repas dans un assemblage Chardonnay Savagnin.

Valérie Gaziaux nous avait apporté trois vins de son Champ d’étoiles pour nous faire déguster.

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VG – Nous allons commencer par la cuvée Chanson Pinot 2009. Un vin rouge de Pinot Noir.

RH – Belle robe rubis tirant légèrement vers le violet. Les arômes sont délicieux.
VG – Il faut fermer les yeux et on sent venir la cerise, la cerise griotte noire et si on poursuit le nez on peut arriver jusqu’aux myrtilles.

RH – En bouche c’est un vin délicieux, c’est un vin de joie.
VG – C’est une cuvée Chanson au départ, nous avons essayé de faire un vin vivant, une structure fine, délicate et cristalline, qui soutient énormément de fruits qui s’expriment dans une belle souplesse, de manière gouleyante. Pour nous c’est un vin en Chanson qui doit pouvoir être bu avec bonheur et simplicité.

RH – Une fois qu’on a bu un verre, il demande un autre verre…
– Et après une bouteille, une autre bouteille! réplica Valérie Gaziaux avec un éclat de rire aussi cristallin que son vin.

Comme deuxième vin nous fut servi sa Cuvée Chanson Chardonnay 2009.

RH – Très belle couleur jaune d’or, même nacrée avec les jeux de lumière. Les arômes…
VG – Si on ferme les yeux on est au printemps, ce sont des fleurs blanches, et des fruits blancs, les pêches blanches.

RH – Le goût tout en équilibre.
VG – De nouveau en signature une structure très élancée, avec des petits fruits blancs qui s’accrochent en cortège et qui se succèdent les uns après les autres.

RH – Et une finale très heureuse.
VG – Qui redemande encore un autre verre.

RH – Et cela justifie les médailles que vous avez reçues.

Nous sommes finalement partis sur la cuvée Stellaire Castor 2009. Un assemblage Chardonnay Savagnin ouillé, c'est-à-dire de manière bourguignonne.

RH – Très, très jolie couleur jaune d’or, très brillante. Les arômes sont aussi riches.
VG – Le nez est assez extraordinaire parce qu’on est sur l’explosion du Savagnin, avant l’exploitation du voile qui est la manière de vinifier dans le Jura. Nous avons également un nez de fleurs mais on passe sur des fruits tels que la mangue, les fruits exotiques.

RH – C’est une joie du début à la fin.
VG – En bouche, il y a toute la rondeur, l’attaque ample du Chardonnay, mais un squelette très élancé donné par le Savagnin. C’est un vin qui est très long en bouche qui accompagne avec beaucoup de joie les plats épicés, qui rentrent en synergie avec lui.

Je remerciai Valérie Gaziaux pour sa gentillesse et lui souhaitai bon séjour et que son retour soit un poème comme son vignoble.

Roger Huet
Chroniqueur de vins
Animateur de l’émission Littérature et gourmandise
Président du Club des Joyeux

À propos de l' auteur

Roger Huet - Chroniqueur vins et Président du Club des Joyeux
Québécois d’origine sud-américaine, Roger Huet apporte au monde du vin sa grande curiosité et son esprit de fête. Ancien avocat, diplômé en sciences politiques et en sociologie, amoureux d’histoire, auteur de nombreux ouvrages, diplomate, éditeur. Il considère la vie comme un voyage, de la naissance à la mort. Un voyage où chaque jour heureux est un gain, chaque jour malheureux un gâchis. Lire la suite...