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Les primeurs à Bordeaux : l'heure d'un tout premier bilan a sonné

Les primeurs à Bordeaux : l'heure d'un tout premier bilan a sonné

Pendant une semaine, 6000 acheteurs, de l'importateur au restaurateur français et étranger, ainsi que des journalistes spécialisés, se sont pressés notamment dans huit domaines regroupant les dégustations par appellation. Ce système de commercialisation unique au monde permet à quelque 200 châteaux de vendre avant l'heure presque toute leur production, voire la totalité, via des négociants, et d'obtenir ainsi de la trésorerie. Les acheteurs y trouvent leur compte en acquérant des vins qui devraient en principe être vendus plus chers une fois sur le marché et dans certains cas, introuvables tant la demande est forte.

Mais que vaut ce millésime? À la lecture des premiers articles de la presse spécialisées, 2018 est une très belle réussite. Certains parlent même d’un millésime exceptionnel, mais il est sans doute un peu tôt pour être aussi affirmatif. « En rouge, tout est très doux, très concentré. Il y a beaucoup d'alcool, 14 degrés, et on ne le sent pas, c'est bien. Mais dans certaines appellations, la qualité varie beaucoup avec parfois de la surmaturité. Ça donne un côté marmelade qu'on tient à éviter », explique un journaliste du Winenow Magazine, à la Revue des vins de France diffusée à Hong Kong et en Chine.

Mais maintenant, le suspens commence: à quel prix les Châteaux vont-ils proposer leur vin pour cette nouvelle campagne? « Tant que les gens feront de l’argent en commerçant sur les grands crus, tant que les propriétés y auront un intérêt économique, tout convergera à ce que le système perdure… On a tendance à voir le système se conforter: on a vécu une année 2018 très prospère, sur l’exportation des grands crus avec une augmentation sur tous les continents, un peu moins forte en Asie, mais finalement très forte en Europe et aux États-Unis », nous indique Ronan Laborde président de l’UGCB (union des Grands Crus de Bordeaux).

Interrogé au commencement de la semaine des Primeurs à Bordeaux, Fabrice Bernard, à la tête de la maison de négoce bordelaise Millésima, donnait à cette question une réponse mesurée, empreinte de prudence. « Quel prix? C’est une très bonne question, et sincèrement ce n’est pas pour faire la langue de bois mais je ne sais pas trop quoi répondre. Plusieurs propriétaires m’ont déjà posé la question, et je trouve que donner un niveau de prix est très difficile actuellement. Les vins sont délicieux en 2018, c’est indéniablement un très grand millésime, la presse en attestera à l’issue de la semaine des primeurs. Pour moi, on a la puissance du 2009 avec l’élégance du 2010. Par contre, on a un marché et une actualité économique compliqués. La Chine est un peu à l’arrêt, il y a le Brexit en Angleterre… La qualité est là, mais maintenant, il faut trouver le bon prix pour une distribution. Je pense qu’il faut être raisonnable, parce que le millésime 2017 a été vendu un peu trop cher. C’est un peu comme le millésime 2011, qui est passé après 2009 et 2010, 2017 passe après 2015 et 2016. Il y a beaucoup de tension; le mieux placé pour donner le prix, c’est le consommateur. Si la perception qu’il a du rapport qualité-prix est bon, il n’y aura aucun problème. Si, à l’issue des dégustations primeurs, tout le monde est unanime pour dire que c’est un grand millésime, on pourra augmenter raisonnablement les prix. »

Mais cette prévision de hausse des prix des grands crus ne reflète pas la réalité du marché bordelais, dont 40% des volumes sont vendus en vrac alors que les vins prestigieux n'en représentent que 3%. Et cette année, les prix du vrac sont à la baisse en raison d'une quantité suffisante. À suivre, donc !

Source: McViti

À propos de l' auteur

Âgé de 45 ans, ingénieur agricole, diplômé de l’IHEDREA (Institut des Hautes Etudes de Droit Rural et d’Economie Agricole en 1995), j’ai poursuivi mes études par un master de Gestion, Droit et Marketing du secteur Vitivinicole et des Eaux de Vie dépendant l’Université de Paris 10 Nanterre et de l’OIV (Organisation Internationale de la Vigne et du Vin - 1997). Lire la suite...