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Jean Aubry nous rappelle les avantages du vin consommé avec modération

Jean Aubry nous rappelle les avantages du vin consommé avec modération

À quelques jours de son 119e millésime de naissance, soeur André déclarait forfait la semaine dernière à Toulon pour aller rejoindre son créateur. Elle avait l’habitude, dit-on, de déguster régulièrement un petit verre de porto, histoire de jaser un brin avec « l’eau-delà ». À quelques semaines de son 93e anniversaire, ma propre mère ne se prive toujours pas, lorsque la nuit l’étreint silencieusement, de siroter un large dé à coudre de bon cognac XO que je me fais un devoir, depuis des décennies déjà, de lui offrir. J’évite ainsi d’être un fils indigne. Ce qui n’est pas rien. Le point qui réunit ces deux femmes ? L’alcool, bien sûr, mais aussi une bonne dose de sérénité. Parcimonieusement, il est vrai, mais encore faut-il souligner qu’il s’agit tout de même d’alcool. Si l’une n’est plus, l’autre n’est toujours pas à deux doigts de l’extrême-onction. Foi de fiston.

Vous me voyez venir. L’actualité nous plonge de nouveau, à l’instar d’une énième privatisation de la Société des alcools, dans ces sempiternelles et récurrentes diatribes sur les méfaits de l’alcool. Ne comptez cependant pas sur moi pour faire l’apologie de cette molécule — MORTELLE en majuscule et CH3CH2OH en chinois — sous prétexte que la communauté scientifique — du moins, un « courant » de celle-ci, selon le bon docteur Martin Juneau — affirme qu’elle est aussi cancérigène que tout ce que la fonderie Horne a à offrir à la population locale en matière de cocktail revigorant. J’avoue tout de même que j’en ai personnellement soupé de cette espèce d’hygiénisme wokiste à vous culpabiliser jusqu’à plus soif.

Essayons d’y boire clair

Assistons-nous ici à l’annulation d’une culture plus que millénaire sous prétexte de santé publique ? Vrai que le tribut est lourd sur le plan social comme sur les finances publiques et que la promotion de l’alcool, à l’image des drogues, n’a pas sa place dans la communauté. Balayons-nous sous le tapis de la distillerie cette contribution raffinée qui, historiquement, a vu le jour sous la houlette des Arabes pour être dûment identifiée sous le vocable « alcool » (الكحل ou al-kuhl) ? Nier le produit relève d’une pudibonderie et d’une hypocrisie crasse. Selon la statistique qui met dans le même panier vin et alcool (alcoométrie de 40 % et plus), 75 % des Canadiens entretiendraient un rapport plus ou moins intime avec le produit. Il serait peut-être temps de faire face à la réalité, quitte à foutre la gueule de bois à la morale ambiante, tout en « individualisant le risque et en faisant appel au jugement des gens ».

Lire la suite: Le Devoir du 27 janvier 2023