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Merci au magazine Caribou pour nous éclairer sur certaines lois farfelues sur les vins et alcools au Québec

Merci au magazine Caribou pour nous éclairer sur certaines lois farfelues sur les vins et alcools au Québec

Une élection, qu’est-ce que ça peut changer pour les vignerons du Québec? Sébastien Daoust espère un grand dépoussiérage des règlements sur les alcools du terroir au Québec. Démonstration en quatre exemples de pourquoi notre province aurait besoin d’un bon coup de balai!

Septembre vient de commencer avec ce qui est ma version de la coupe Stanley, c’est-à-dire une élection. Je n’ai aucun amour particulier pour les sports professionnels, et donc à part si le Canadien est en finale de la coupe, je m’en balance pas mal.

Mais une soirée d’élection? Je sors le popcorn, et je regarde ça jusqu’aux petites heures de la nuit. J’aime les élections, j’aime les stratégies électorales.

Je me prends à imaginer ce que je demanderais aux politiciens, si j’avais moindrement une voix à cet égard. Et j’aimerais les confronter à ce qu’ils verraient comme solution face aux quatre situations suivantes.

Situation A

1er octobre. Il est 21h. Votre équipe de récolte vient de terminer le dernier rang de chardonnay. Le pressoir fonctionne depuis 8h ce matin, sans cesse. Vous avez réussi à tout ramasser avant la pluie. La récolte est superbe. Il vous reste encore 2 tonnes à presser.

Une lumière rouge s’allume sur votre pressoir, puis ça sent le brûlé. Vous éteignez la machine, la repartez, et plus rien. Vous recommencez et recommencez. Vous ouvrez le panneau électrique et du haut de votre dernier cours de physique électrique de secondaire 3, vous essayez de comprendre ce qui se passe. Désespéré, vous appelez votre fournisseur. Fort heureusement, pendant les vendanges, ils sont disponibles presque 24h/7j. Quelques photos plus tard, le diagnostic est simple. Le contrôleur est brûlé. Pas de problème. Il y en a un aux États-Unis, il devrait arriver d’ici 5 jours.

Sauf que vous avez 1 tonne de raisins qui traîne. C’est la nuit, il fait frais, mais quand le jour va arriver, ça va commencer à chauffer. Vous pouvez, tout au plus, attendre un gros 12 heures. Mais pas 5 jours.

Solution ailleurs dans le monde: Vous appelez quelques autres vignerons. L’un d’entre eux, à 10 minutes de chez vous, n’a pas récolté aujourd’hui. Il se fait tard, mais première heure, demain matin, vous amenez votre raisin chez lui. Vous le pressez, vous embarquez le jus dans une tôte de plastique, vous revenez chez vous. Un peu bordélique, mais vous avez sauvé une belle tonne de chardo!

Solution au Québec: La loi est ainsi faite que le jus ou vin produit par un vigneron ne peut se retrouver chez un autre vigneron. Ainsi, emmener du raisin chez un autre vigneron est illégal, et avoir du moût chez un autre vigneron l’est encore plus. Donc, vous avez le choix. Vous essayez de trouver un pressoir ailleurs et de convaincre un vigneron de l’amener chez vous. En général, un pressoir est très lourd. Il peut être en électricité monophase, ou triphase, il peut être sur le 20, 30 ou 50 ampères, avec une connexion barrée ou une connexion conventionnelle. Les chances que votre voisin ait, dans les 12 prochaines heures, exactement le type de pressoir qu’il vous faut (connecteur, ampérage, phase), et une plateforme de transport pouvant supporter une charge d’une tonne… ces chances sont faibles.

Donc, vous êtes mieux de jeter votre tonne de chardo. C’est probablement 1000 bouteilles aux vidanges ça. Mais consolez-vous, en respectant la loi à la lettre, vous avez rendu le Québec plus sécuritaire. Et ça, ça n’a pas de prix.

Lire la suite: Caribou du 8 septembre 2022