samedi 20 avril 2024
SANTÉ - Quand les femmes en ont assez de faire la bise au travail

SANTÉ - Quand les femmes en ont assez de faire la bise au travail

La bonne résolution pour 2018 d’Aude Picard-Wolff, maire d’une petite commune de Morette (Isère), est peu conventionnelle : arrêter de faire la bise. "Le rituel de la bise me pèse et me gêne. Aujourd’hui, c’est un geste qui est devenu systématique et qui ne signifie plus rien. C’est aussi le risque de se transmettre des virus (…) surtout en période de grippe. Cela devient insupportable", confie-t-elle au Parisien.

Après être arrivée plusieurs fois en retard aux réunions ou avoir prétexté un rhume "pour ne pas avoir à faire la bise aux 73 conseillers communautaires", la maire a décidé de se libérer de cette corvée en annonçant par mail à ses collaborateurs qu’ils devraient désormais se contenter d’une poignée de main.

"Pouvoir faire comme les hommes avec les autres hommes"

En plus de limiter les risques de contagion et de gagner un temps considérable, l’élue avoue au quotidien parisien vouloir en finir avec le traitement différencié des hommes et des femmes : "Je souhaite pouvoir faire comme les hommes avec les autres hommes : serrer la main à toutes les femmes et à tous les hommes à la place des deux bises habituelles", explique-t-elle.

Si beaucoup au sein de sa commune ont trouvé "ridicule" la revendication de la maire iséroise, cette dernière avoue à Ouest-France avoir reçu "beaucoup de lettres de soutien, de courriers de femmes qui me félicitent d’avoir eu le courage de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Une bonne partie ne souhaite pas faire la bise mais n’ose pas le dire".

Même constatation du côté de Romy Duhem-Verdière, une conceptrice web et blogueuse parisienne. Elle raconte avoir envoyé à son arrivée un mail à l’ensemble de sa boîte pour prévenir qu’elle préférait "le salut à la japonaise, à l’indienne, le check (…) ou tout simplement la bonne vieille poignée de main qui met tout le monde à égalité". Sur son blog, les commentaires pleuvent : les femmes expriment leur malaise à devoir faire systématiquement la bise au travail, tandis que les hommes confessent ne pas toujours savoir comment saluer leurs collègues féminines.

Un geste intime parfois mal vécu

Perte de temps, contagion, relents de sexisme… Combattre la bise n’est donc peut-être pas aussi futile qu’il n’y paraît. Jusqu’aux années 1970, la bise était strictement réservée aux amis ou à la famille. Malgré sa banalisation, faire la bise est donc par définition un geste intime, qui impose aux femmes une proximité avec leur interlocuteur qui peut être dérangeante.

Et si c’est par le biais de la mixité, dans les écoles comme dans les entreprises, que la bise a pu s’inviter sur nos lieux de travail, ce rituel est loin d’être un usage équitablement partagé par les deux sexes. C’est aux femmes qu’incombe le plus souvent cette corvée, tandis que les hommes peuvent se contenter d’une poignée de main formelle.

"Pourquoi nous, les femmes, nous devrions nous faire la bise, alors que les hommes ne se la font pas ?", interroge Aude Picard-Wolff. "C’est révélateur d’une petite inégalité entre hommes et femme", ajoute-t-elle dans Le Parisien, avant de rappeler que les codes sociaux, révélateurs des moeurs d’une époque, doivent évoluer avec les mentalités.

Source: Sud Ouest.fr du 4 janvier 2018