mercredi 24 avril 2024
La faillite de Nutresia et de son autocuiseur Chef Cuisine

La faillite de Nutresia et de son autocuiseur Chef Cuisine

Nutresia SA c’est la société suisse qui avait imaginé, conçu et commercialisé l’autocuiseur – Chef Cuisine – qui permettait de remettre en température des plats cuisinés de qualité. Grâce à un réchauffage intelligent on pouvait obtenir de véritables plats gastronomiques à la maison.

Malheureusement le produit n’a pas trouvé son public, le prix élevé d’acquisition de la machine, la complexité de sa mise en oeuvre au quotidien, un marché par encore prêt à autant de précision… pourtant l’idée était géniale, la chef Anne-Sophie Pic s’était personnellement investie dans le projet et avait prêté son image, son talent et mis au point les recettes, enfin une machine proposait des cuissons parfaites et un réchauffage maîtrisé.

Voilà ce que révèle la presse Suisse ( 24Heurs.ch ) – EXTRAITS –

Les 34 millions de francs (suisses soit 31 Millions d’euros) injectés dans le projet n’y auront pas suffi : la société Nutresia SA, qui souhaitait révolutionner la cuisine en amenant la gastronomie d’Anne-Sophie Pic à la maison grâce à un autocuiseur révolutionnaire, vient de déposer le bilan. Elle avait pourtant fait le tour de toutes les chaînes de télévision peu avant Noël 2015, afin de vanter les mérites de son Chef Cuisine. En vain. Et comme il n’est désormais plus possible de commander ses fameux petits plats à réchauffer sur Internet, la Toile gronde.

L’idée du Chef Cuisine avait mijoté dans l’esprit de Jonathan Pennella, président de Nutresia SA, pendant cinq longues années. C’est lui qui, pour Nestlé, avait développé les produits Special T et Dolce Gusto, deux succès mondiaux qu’il espérait transposer au milieu de la gastronomie. Sur le principe, le cuiseur automatique mixait les techniques du bain-marie et de la vapeur, dans lequel les plats cuisinés d’Anne-Sophie Pic étaient «remis en température», au degré près, grâce à une puce incorporée dans les «enveloppes saveurs». Une fois déboursés 229 francs pour l’appareil, …/…. Sauf que la sauce n’a pas pris.

«Je reste persuadé que le concept était excellent au niveau de la recherche et du développement. C’est vrai que cela a demandé beaucoup d’argent, mais on avait besoin de beaucoup de volume pour tourner, et le succès n’a pas été au rendez-vous», concède Jonathan Pennella. Il faut dire que le business plan était ambitieux : pour que l’affaire roule, il fallait vendre 40’000 appareils par année. «Nous l’avons lancé en pleine période de fêtes de fin d’année en 2015. Avec les spots publicitaires dans lesquels Anne-Sophie Pic vantait le produit, on espérait même en écouler 35’000 durant les tout premiers mois», se souvient le président de Nutresia SA. Mais au final, seules 6000 machines se sont retrouvées dans les foyers. Et encore. En comptant celles en promotion et celles offertes «parce qu’elles étaient plus utiles chez les gens que dans les dépôts», ce sont 2000 modèles qui ont réellement été vendus par année. Pire qu’un cuiseur automatique: un véritable four.

Des machines trop bradées

Sentant l’échec arriver, la société Nutresia a bien tenté de repositionner Chef Cuisine en misant davantage sur les plats cuisinés du quotidien que sur les plats gastronomiques estampillés Anne-Sophie Pic. Le prix des machines a été revu à la baisse, atteignant 129 euros avec six plats offerts, quand bien même elle coûtait 250 francs à la production en Chine. En vain. «Le calcul n’était pas le bon. A un prix aussi bas, on ne fidélise pas un client. Il passe une commande de plats une fois, pour voir, et il s’arrête souvent là», analyse aujourd’hui Jonathan Pennella. L’infrastructure devenait «démesurée» par rapport au volume écoulé. Les prix fixes étaient trop élevés. La faillite était inévitable. Elle a été prononcée par l’Office cantonal fribourgeois en mars dernier. «Le juge ne nous a pas donné l’occasion de restructurer l’entreprise, en nous accordant un sursis par exemple, c’est dommage.»

Cinq fondateurs, dont Jonathan Pennella, étaient les premiers actionnaires de Nutresia SA. Soutenue par le Canton de Fribourg, la société avait ensuite augmenté son capital en convainquant des proches. Une somme suffisante pour peaufiner les détails, dessiner les premiers plans et concevoir des prototypes. Puis de gros investisseurs avaient rejoint l’aventure, parmi lesquels une «grande famille» de Suisse, une autre famille de France active dans la presse et le géant français de la volaille LDC (Poulets de Loué). En 2016, une nouvelle levée de fonds de 9 millions de francs avait été réalisée. Jonathan Pennella: «L’argent est malheureusement perdu pour les investisseurs, mais tout le monde était au courant qu’il y avait un risque, dès le départ.»

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Caroline Raymond directrice de la communication d’Anne-Sophie Pic répond à La Tribune de Genève

«Nous avons fait notre part dans ce projet, nous avons apporté notre expertise et notre savoir-faire en nous investissant en temps et en énergie. Anne-Sophie Pic est désolée pour les clients de Chef Cuisine, qui se retrouvent avec cet appareil sur les bras, mais elle ne regrette pas d’en avoir porté l’image. C’était un beau projet.»

«Son souhait était véritablement d’apporter sa contribution à ce qui devait être une révolution dans le monde des plats cuisinés. Elle y croyait et elle s’y est engagée à 400%, mais dans ce genre d’aventure très ambitieuse, il n’y a pas de risque zéro. Il faut du temps pour asseoir une telle innovation. Il est parfois difficile de changer les comportements alimentaires.»«

«Elle ne l’aurait pas fait s’il ne s’était agi que d’une question d’image. Mais il est vrai que s’il devait y avoir une prochaine fois, avec la nouvelle équipe de Chef Cuisine ou pour un autre projet, je crois qu’il faudra qu’on lui présente de solides garanties.» «

Source: Food & Sens du 1er juin 2017