jeudi 28 mars 2024
Le rosé pour accompagner vos grillades

Le rosé pour accompagner vos grillades

Vous songiez à servir vos grillades estivales avec une bonne bière ou un vin rouge charnu et boisé. Mais oseriez-vous déboucher du rosé ? Pourquoi pas ! Excellent à l'apéro, le vin rosé s'avère un formidable allié pour les repas cuisinés sur les flammes du barbecue, soutiennent nos chroniqueuses Karyne Duplessis Piché et Véronique Rivest. Elles vous expliquent pourquoi, et proposent des bouteilles à inviter au souper.

Karyne Duplessis Piché : Véronique, as-tu vu tous les rosés offerts en ce moment au Québec ? On a beau dire que le rosé se déguste toute l'année, c'est l'été que le choix est le plus varié. Les fermentations sont terminées et les vignerons mettent en marché leur rosé avec l'arrivée de la belle saison.

Véronique Rivest : L'arrivée des rosés sur les tablettes, c'est un peu comme la percée des premiers bourgeons. Ça annonce l'arrivée de la belle saison ! Et quand elle tarde à arriver, comme cette année, ils nous en donnent un avant-goût. Il y en a qui forcent les tulipes, moi j'essaie de forcer l'été !

K.D.P. : Ça tombe bien, car c'est en ce moment qu'on a la rage du barbecue. Dès que le soleil se pointe, hop, les grillades sont au menu. Y a-t-il un vin mieux adapté aux soupers sur la terrasse que le rosé ? Pas chez nous !

V.R. : Le rosé a en effet le même caractère sans chichi que la cuisine au barbecue. Il fait beau, il fait chaud, on a envie de passer du temps dehors, pas aux fourneaux ! Les vins rosés évoquent ce même sentiment de spontanéité et de joie de vivre. On aime bien boire et bien manger, mais quand ce peut être en toute simplicité, c'est encore mieux !

K.D.P. : J'ai pourtant l'air d'une extraterrestre quand je sers du rosé à table. Les vieilles habitudes ont la couenne dure ! Imagine quand je l'accompagne de viande grillée ! Pourtant, je ne t'apprends rien, ce vin est un fabuleux trait d'union entre le blanc et le rouge. C'est souvent un bon compromis quand l'accord est difficile : olives, salades, oeufs, tomates... et barbecue.

V.R. : On ne le répétera jamais assez : du rosé, c'est du vin avant tout, et le vin, c'est toujours meilleur à table. D'ailleurs, le rosé peut être un excellent vin de gastronomie et accompagner des préparations très soignées. Mais il brille aussi avec une grande variété de plats parce qu'il est très polyvalent. Son absence de tanins et de bois, des éléments qui réagissent avec beaucoup d'aliments, ainsi que sa fraîcheur en font un vin très passe-partout.

K.D.P. : Évidemment, tous les rosés ne se prêtent pas avec brio à cet accord. Ceux plus fruités et même « sucrés » se consomment davantage à l'apéritif. Mais j'ai toujours au frais un rosé plus puissant, plus structuré, qui accompagne bien les grillades. Je pense à ceux de Tavel ou de Bandol. Mais on est parfois surpris !

V.R. : On devrait tous avoir une ou deux bouteilles de rosé au frais en tout temps en cette saison. Au cas où de la visite débarquerait à l'improviste pour l'apéro ou pour casser la croûte. Ça donne tout de suite le ton pour un moment de détente et de plaisir !

K.D.P. : L'oenologue Pauline Lhote de la maison Chandon, en Californie, m'a servi ce printemps son mousseux rosé avec un steak saignant. Aurais-tu osé, toi ? J'en rêve encore tellement l'accord était réussi. Les notes épicées du pinot noir et meunier allaient de pair avec la viande.

V.R. : Ah, les accords mets-vins ! Toujours tellement de surprises ! En fait, beaucoup d'accords se font, ou se défont, en fonction de la manière dont le vin réagit aux aliments. Comme je le mentionnais plus tôt, de par leur structure, les rosés sont des vins très polyvalents à table. Donc un vin rosé servi avec des grillades, même avec des viandes rouges, ne rougira pas du tout ! Au contraire, sa texture souvent plus ample, plus grasse, aura tendance à enrober les saveurs relevées des viandes grillées et des sauces ou condiments, même épicés, qui les accompagnent souvent. Par ailleurs, les rosés secs, comme le sont souvent ceux du sud de la France et de l'Italie, ont une affinité particulière avec la cuisine méditerranéenne : tomates, courgettes, aubergines et fenouil, fines herbes, ail, olive et, bien sûr, huile d'olive.

K.D.P. : Depuis, je m'inspire de cette dégustation pour servir mes rosés non seulement avec du poulet et des saucisses, mais aussi avec de la viande rouge nappée de chimichurri. Les Argentins ne seraient peut-être pas d'accord !

V.R. : Finalement, tout ce qui compte, c'est de se faire plaisir ! Et explorer de nouveaux accords est toujours un exercice agréable. L'accord avec le chimichurri ne me surprend pas : des herbes, de l'ail et de l'huile d'olive ? C'est du sur-mesure pour le rosé !

K.D.P. : Je remarque que le sud de la France produit encore les meilleurs rosés. Des vins secs, légèrement parfumés et si agréables en bouche. Leur couleur, souvent plus pâle, comme l'a mis de l'avant Régine Sumeire (Pétale de rose) dans les années 80, fait école partout sur la planète.

V.R. : Dans le fond, ce n'est pas si surprenant. En Provence, on fait du rosé depuis très longtemps. Beaucoup d'autres régions ont commencé à en produire seulement quand c'est redevenu à la mode. Parfois, le rosé est même un produit secondaire de la vinification des rouges... C'est quand on fait un rosé dès la vigne, quand on a des parcelles qui y sont consacrées, et qu'on l'élabore avec les mêmes soins que tous nos autres vins, qu'on produit de vrais bons rosés. Et comme la Provence est synonyme de rosé, il va de soi que ses vins sont en telle symbiose avec sa cuisine.

K.D.P. : J'ai d'ailleurs une excellente bouteille de rosé qui t'attend à la maison. Passe me voir cet été, qu'on la déguste ensemble.

V.R. : Tu ne me le diras pas deux fois ! 

Source: Lou White, via La Presse du 22 mai 2017